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Aéroport de Notre-Dame-des-Landes : l’Etat doit avoir le courage d'abandonner un projet climaticide, surdimensionné et inutile

Publié le 22 décembre 2017 , mis à jour le 18 novembre 2020

Le 13 décembre dernier, trois experts nommés par le gouvernement remettaient leur rapport sur l’avenir de l’aéroport nantais. Construction d’un nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes ou réaménagement de l’aéroport actuel de Nantes-Atlantique, les deux options sont comparées à l’aune de critères économiques, sociaux, environnementaux, à court moyen et long terme. Cette nouvelle contribution au débat doit permettre de sortir enfin du conflit qui s’est enlisé depuis plusieurs décennies, et d’appuyer l’arbitrage attendu en janvier 2018.

Pour la FNH, ce rapport confirme que le projet de construction d’un nouvel aéroport doit être abandonné, parce qu’il n’est plus en phase avec notre époque. Il ne répond pas aux priorités actuelles de l’investissement public, il porte atteinte au climat et à un environnement fragile, il ne prend pas en compte l’évolution des pratiques de mobilité. La priorité est donc à la réhabilitation de l’aéroport Nantes Atlantique, dans un contexte de limitation du trafic aérien en France, et de fin des subventions à un secteur de l’aviation trop généreusement aidé par les pouvoirs publics.

La FNH appelle le gouvernement à faire un choix courageux et à abandonner le projet de construction de l’aéroport à Notre-Dame des Landes. C’est le seul choix qui permettra d’en finir avec le monde d’hier et les grands projets inutiles, et de proposer une vision renouvelée d’un développement économique compatible avec la préservation de l’environnement et du climat. 

NDDL: un projet surdimensionné et inutile

Abandonner le projet de Notre-Dame-des-Landes 

Ce rapport constate en premier lieu « l’inefficacité des procédures consultatives pour forger une décision collective, et l’enlisement consécutif du conflit ».  L’inanité du référendum de 2016, alors décrié par la FNH, est confirmé. 

Il apporte par ailleurs une vision équilibrée des deux options possibles. Il confirme notamment les faiblesses du projet de Notre-Dame-des-Landes : 

• La consommation 1000 ha de terres agricoles ;

• Les atteintes aux milieux naturels et aux zones humides, sans qu’il n’y ait de dispositif de compensation crédible à ce jour.

• Les émissions de gaz à effet de serre supplémentaires induites par le projet.

• Un cout supérieur pour la collectivité par rapport à la réhabilitation de Nantes Atlantique ; 

• Une plus-value économique limitée pour le territoire. 

• Une inadéquation totale avec l'évolution nécessaire des modes de déplacement vers plus de soutenabilité.

• Un effet néfaste sur les équilibres territoriaux, en termes d’emplois, et au regard de l’étalement urbain induit sur le long terme.

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La réhabilitation de l’aéroport existant doit permettre de résoudre les problématiques des nuisances sonores et de pollution de l’air liée aux particules, en s’appuyant sur les recommandations concrètes fournies par les experts. Elle devra faire l’objet d’un débat public apaisé, se concevoir dans une approche intégrée des transports, en favorisant l’accès de l’infrastructure en transports en commun depuis le centre-ville, et s’inscrire dans une perspective de réduction du trafic aérien qui permettra de s’affranchir d’investissements lourds. 

Définir un projet de territoire « positif »

La FNH soutient la proposition des experts pour « cicatriser les plaies des conflits passés » autour d’une alternative à Notre Dame des Landes : il est en effet souhaitable qu’un « contrat de territoire réellement « soutenable » soit défini, « sur le modèle des « Contrats de transition écologique » (CTE) mis en place par le gouvernement, (pouvant) être l’occasion de construire avec les acteurs locaux un projet dynamique, reconnu par l’Etat au plus haut niveau ». Nous devons imaginer ensemble un avenir à ce territoire, qui intègre les besoins des citadins comme des habitants des zones rurales, qui donne à toutes et tous un horizon intégrant une soutenabilité économique, sociale et environnementale.

Lire la tribune des ONG sur Médiapart : Remise du rapport de Notre-Dame-des-Landes : l’épreuve de vérité

Prendre en compte l’objectif de réduction du trafic aérien à long terme

L’augmentation du trafic aérien de l’aéroport nantais, de 5 millions actuellement à 9 millions en 2040, est proposée comme unique perspective dans l’une ou l’autre des options, Nantes Atlantique ou Notre-Dame-des-Landes. Les experts estiment que l’augmentation du trafic est en effet légitime à horizon 2040-2050. Aucune hypothèse alternative à l’augmentation tendancielle n’est étudiée, ni même envisagée dans un calendrier compatible avec les objectifs climat fixés pour 2030 et 2050.

Pour la suite, « l'accord de Paris de 2015 conduit à penser que le transport aérien, tout comme les autres secteurs devra s’inscrire dans des changements tendanciels très profonds nécessaires au maintien d’un monde vivable ». 

Le trafic aérien échappe ici, une fois de plus, au compte à rebours climatique, au mépris des impacts que cela aura sur les sociétés.  La décision du gouvernement devra pourtant prendre en compte l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre liées aux transports et au trafic aérien en particulier. La baisse du trafic aérien est l’un des déterminants de l’atteinte, ou non, de l’objectif de maintien du réchauffement en deçà de 2°C. 

Lire notre dossier : le transport aérien doit prendre sa part dans la lutte contre le changement climatique

La FNH recommande d’évaluer à l’occasion du débat public sur le projet de réhabilitation de l’aéroport de Nantes Atlantique, l’évolution des besoins réels de mobilité couverts par le trafic aérien et les solutions pour réduire le trafic aérien. 

L’issue au conflit latent de Notre-Dame-des-Landes se trouve en effet dans une vision intégrée des déplacements permettant de combiner les différents modes, du train à la voiture en passant par l'aérien.  Il est temps de changer de logiciel. 

Pour une vision renouvelée des mobilités actuelles et futures 

Les Assises de la mobilité se sont closes le 13 décembre dernier, alors que les experts remettaient le rapport de mission sur l’aéroport nantais au Premier ministre. Ces Assises ont permis un débat inédit sur l’avenir de la mobilité du quotidien. Cette séquence a été portée par l’ambition gouvernementale de mettre la priorité sur les transports du quotidien plutôt que sur les grands projets. La décision que le gouvernement prendra concernant l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes sera donc à ce titre une épreuve de vérité, ce projet étant un cas exemplaire parmi de nombreux grands projets d’infrastructures de transports, qui se révèlent inutiles et destructeurs. 

Nous pouvons regretter que le débat des Assises n’ait pas porté sur toutes les mobilités, évacuant de fait les trajets longue distance qui pourtant, dans un monde ouvert et multiculturel, prennent une place croissante dans nos vies. Il y a sans aucun doute une nouvelle page à écrire, et les Assises de l’aérien prévues en 2018 devront ouvrir le débat sur à la fois la réduction des émissions liées au trafic aérien et l’évolution à la baisse du trafic. 

Pour une réforme de nos institutions et la prise en compte des enjeux de long terme

Le débat autour de Notre-Dame-Des-Landes doit finalement nous amener à nous assurer que les enjeux de long terme soient bien pris en compte dans la décision politique, pour chaque mesure publique, chaque projet soutenu par l’Etat ou les collectivités, chaque décision d’investissement public. La construction d’un nouvel aéroport n’est pas compatible avec la nécessaire neutralité en gaz à effet de serre que vise la France d’ici 2050. Comment éviter la croissance du trafic aérien sur le long terme, et plutôt amener le trafic à la baisse via le développement des alternatives à l’avion et la transformation de notre façon de nous déplacer ? C’est pour donner des réponses à ces questions, aujourd’hui ignorées par les décideurs politiques, que la FNH travaille depuis de nombreuses années sur nos institutions et formule des propositions permettant de mieux prendre en compte les enjeux de long terme dans la prise de décision publique. L’une de ses propositions phares est l'Assemblée citoyenne du futur (ou « Chambre du futur »), conçue comme un contrepoids démocratique aux pressions du court terme. Le président Macron a annoncé sa création devant le Congrès à Versailles en début de quinquennat… Cependant, à ce stade, il n’a pas affiché la volonté de la doter des outils nécessaires pour lui permettre de répondre à ces défis. Reste désormais à avoir le courage de concrétiser cette annonce et de créer les institutions « nouvelle génération » qui éviteront que ne se reproduise le conflit vécu depuis des décennies à Notre-Dame-des-Landes.

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