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Mettre le commerce au service de la transition écologique et sociale 

Publié le 01 octobre 2019 , mis à jour le 19 janvier 2023

Entre un libre-échange débridé et un protectionnisme idiot, la Fondation Nicolas Hulot et l’Institut Veblen prônent une voie alternative et présentent, dans le rapport « Mettre le commerce au service de la transition écologique et sociale », 37 recommandations pour transformer la politique commerciale européenne.

Rapport

Mettre le commerce au service de la transition écologique et sociale

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Appels à sauver l’Amazonie, demande de suspension de la ratification de l’accord avec le Mercosur par la France et l’Irlande face à la politique environnementale de Jair Bolsonaro, mobilisations sans précédent contre le CETA... L’impact du commerce mondial sur le dérèglement climatique, la déforestation, l’avenir des agriculteurs ou la qualité des produits alimentaires est désormais un sujet impossible à éluder. Les nouveaux Eurodéputés et Commissaires européens vont devoir s’en saisir rapidement sous peine de mettre en péril le projet européen. La FNH et l’Institut Veblen ont décortiqué la politique commerciale européenne et entrepris de proposer une alternative au libre-échange, érigé comme un véritable dogme. Dans un rapport inédit, publié ce jeudi 3 octobre 2019, nos deux organisations dégagent 37 propositions pour mettre le commerce au service de la transition écologique et sociale et rappellent la nécessité d’un moratoire sur la vingtaine de négociations en cours pour ouvrir une réforme, devenue incontournable. 

Réformer la politique commerciale européenne: un sujet difficile à inscrire dans l'agenda politique tant le débat est mal posé 

Pointons d’abord le nœud du problème : constituant l’un des principaux fondements de la construction du marché commun à l’origine de l’Union européenne, le libre-échange est un dogme qui ne souffre aucune contradiction. Le commerce est traité comme une fin en soi, peu importent ses effets sur l’ensemble de la société. 

Et pourtant, les règles du commerce mondial ou plutôt l’absence de règles contraignantes en matière sociale et environnementale, ne permettent pas de prendre en compte des urgences actuelles. Pire, elles contribuent au développement d’un modèle économique insoutenable et incohérent réduisant les marges de manœuvre des États dans de nombreux domaines et donnant un droit de regard aux entreprises multinationales sur les décisions de politiques publiques. Samuel Leré (Responsable plaidoyer FNH) et Mathilde Dupré (Co-directrice de l’Institut Veblen), auteurs du rapport rappellent cependant : « Nous ne sommes pas contre le commerce, mais nous prônons un changement de logiciel dans la manière d’appréhender les échanges pour qu’ils deviennent des leviers de transition et non le contraire ». 

Réformer la politique commerciale européenne

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Comment passer du libre échange au juste échange ?

37 propositions mises au débat pour une réforme de fond en comble 

La FNH et l’Institut Veblen formulent une série de propositions qui vont de mesures unilatérales à des changements à adopter dans la conduite des négociations commerciales : de la manière dont sont négociés les accords, jusqu’à leur finalité, en passant par le choix des partenaires et les outils à mettre en place. L’objectif est de les mettre au débat dans le contexte de la mise en place de la nouvelle Commission européenne, tant au niveau national qu’européen. 

LES 5 PROPOSITIONS CLÉS 

1. L’Europe doit se doter d’une réelle diplomatie commerciale en maniant la carotte et le bâton. 

Forte de son marché de 500 millions de consommateurs, elle doit choisir ses partenaires en faisant du commerce international un levier de diplomatie climatique, de coopération fiscale et de protection des droits humains avec :  Des sanctions commerciales contre les pays qui commettent des violations sévères à l’égard de l’environnement et des droits humains et les paradis fiscaux. Un système favorisant les échanges de produits vertueux avec les pays engagés dans l’application de l’Accord de Paris et des autres conventions et accords internationaux. 

 > L’UE doit non seulement s’abstenir de conclure un accord de commerce avec le Brésil mais encore aller plus loin avec des sanctions commerciales ciblées sur les produits brésiliens qui contribuent à la déforestation comme le bœuf et le soja. 

2. Inclure dans les futurs accords des clauses de suspension des avantages en cas de non-respect des engagements internationaux climatiques, sociaux et fiscaux et ouvrir des négociations pour amender en ce sens les accords déjà en vigueur.


Toute sortie ou violation de l’Accord de Paris sur le climat doit pouvoir faire l’objet d’une 
suspension des avantages commerciaux dont bénéficie le pays concerné. 


3. Mettre en place une exception agri-culturelle pour reconnaître que les biens agricoles ne sont pas des marchandises comme les autres. Mais aussi refuser l’accès au marché européen aux denrées agricoles qui sont produites selon des pratiques interdites dans l’UE.


L’ UE produit et exporte des pesticides pourtant interdits dans l’Union car considérés comme dangereux. Puis 
les pays-membres importent des denrées agricoles traités avec ces mêmes pesticides qui se retrouvent dans les assiettes des européens. C’est donc la double peine : pour les agriculteurs qui subissent une concurrence déloyale, pour les écosystèmes détruits par ces substances nocives. et pour les citoyens intoxiqués à leur insu. 


4. Mettre en place une taxe carbone aux frontières ou tout dispositif à effet équivalent pour lutter contre le dérèglement climatique tout en assurant des conditions équitables pour les producteurs européens et limiter les risques de “fuites” carbones.


La concurrence des entreprises étrangères ne doit plus être un argument contre le 
renforcement des dispositifs européens en matière de prix du carbone. 


5. Supprimer les tribunaux d’arbitrage et instaurer des règles contraignantes en matière de respect des droits humains, 
notamment dans le cadre du traité onusien en cours de négociation sur les entreprises et les droits humains.


En France, en 2017, l’entreprise canadienne Vermilion a menacé le Conseil d’État de poursuites au moment de l’examen de la loi interdisant l’exploitation des hydrocarbures, et obtenu gain de cause puisque le gouvernement a retiré la mesure incriminée, affaiblissant considérablement la portée de la loi. 


Les accords négociés actuellement fixent le cadre des échanges économiques pour les décennies à venir, l’heure n’est donc plus au verdissement progressif de tel ou tel chapitre. La conduite d’une telle réforme suppose aussi de suspendre la ratification des accords tout juste finalisés avec le Canada, le Vietnam, le Mercosur ou encore Singapour et de décréter immédiatement un moratoire sur les négociations en cours avec les Etats-Unis, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Mexique, l’Indonésie... 

rapport commerce

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