Décryptage

Notre Dame des Landes: les clés pour comprendre le fonctionnement d'un "referendum local"

Publié le 16 février 2016 , mis à jour le 23 avril 2021

Jeudi dernier, François Hollande annonçait la tenue d’un référendum local sur le projet d’intérêt national de Notre Dame des Landes d’ici octobre. Une promesse dans la continuité de son engagement, après le drame de Sivens, pour un nouveau modèle de démocratie participative mais impossible à tenir dans l’état du droit. Lancée il y a un an, la réforme pour une démocratisation du dialogue environnemental, qui se traduira par de nouvelles dispositions législatives et réglementaires prises par ordonnance, pourrait fixer rapidement les modalités de cette consultation.

Alors que le CNTE se prononce aujourd'hui sur l’ambition de cette réforme, la Fondation Nicolas Hulot vous propose son analyse des principales dispositions du texte actuel et de leurs impacts sur des projets types. Elle explore enfin les voies pour remanier le texte de l’ordonnance afin de rendre possible une consultation locale à Notre Dame Des Landes qui ne souffre pas des mêmes problèmes de légitimité que le projet lui-même.

NDDL:referendum ou consultation

Quelles voies pour rendre possible une consultation locale à NDDL ?

Dans l’état actuel du droit une consultation locale sur un projet d’intérêt national tel que NDDL n’est pas possible. Il existe plusieurs pistes législatives pour la permettre : le projet d’ordonnance de démocratisation du dialogue environnemental, la proposition de loi relative «au renforcement du dialogue environnemental et de la participation du public», voire un cavalier dans la loi Biodiversité.

Référendum ou consultation ?

La piste d’un référendum local qui contraindrait juridiquement l’Etat à en respecter le résultat ne devrait pas être poursuivie. Il s’agirait plutôt d’aller vers une consultation locale, l’Etat s’engageant politiquement à en respecter le résultat.

Rédaction actuelle du projet d’ordonnance :

La consultation locale prévue dans le projet d’ordonnance pour la démocratisation du dialogue environnemental ne s’appliquerait que sur des projets n’étant pas d’intérêt national et sur lequel l’Etat envisage de prendre une décision. Elle exclurait donc NDDL qui est un projet d’intérêt national et qui a fait l’objet d’un débat public en 2003. De plus l’Etat s’est déjà engagé favorablement sur NDDL. Si la disposition était étendue aux projets d’intérêt nationaux, il serait cependant imaginable de considérer que l’Etat puisse consulter sur la décision d’abandonner le projet ou de privilégier l’optimisation de l’aéroport existant dans le cadre de cette formulation. A défaut, il faudrait introduire une nouvelle disposition, applicable à NDDL, mais il n’est pas certain que l’habilitation conférée par la loi Macron permette de le faire.

Proposition de loi de Sabine Buis :

La proposition de loi relative au renforcement du dialogue environnemental et de la participation du public introduit dans son article 7 une disposition qui pourrait permettre une consultation sur NDDL si elle était adoptée. La rédaction actuelle évoque néanmoins comme le projet d’ordonnance une consultation sur un « projet de dé- cision ». Et le calendrier de cette PPL devrait être très rapide pour permettre une consultation avant octobre. Pour accélérer sa mise en œuvre, il serait aussi envisageable dans reprendre l’esprit dans un cavalier pour la loi Biodiversité.

Quelles conditions pour que la consultation locale ne souffre pas du même déficit de légitimité que le projet lui-même?

Périmètre géographique

La consultation aurait pu légitimement être nationale sur le projet de NDDL au vu de ses impacts et du financement par l’Etat. Elle doit au minimum inclure les deux régions, Pays de la Loire et Bretagne, qui financent et sont directement impactées par le projet. Un périmètre réduit au seul département de Loire Atlantique n’aurait pas une légitimité suffisante.

Constitution du dossier d’information

Le dossier d’information devrait être constitué en coordination par les parties prenantes. Il devrait notamment s’appuyer sur la nouvelle étude annoncée par Ségolène Royal qui devrait à la fois mieux documenter les impacts environnementaux et économiques du projet, notamment sur les autres dessertes aéroportuaires, et les alternatives possibles.

Question posée

La question posée devrait inclure la possibilité d’une alternative. Cela doit être possible d’exprimer un avis contre le transfert à NDDL mais pour une alternative, notamment l’optimisation de l’aéroport existant.

RÉSUMÉ

Des points positifs

  • La création d’un droit d’initiative citoyenne pour déclencher une concertation préalable en amont des projets et plans / programmes.
  • La possibilité de déclencher un débat public local ou national sur pétition.
  • Des missions élargies pour la Commission Nationale du Débat Public.
  • Des principes fixés pour la participation du public.

Un manque global d’ambition

  • Les ordonnances renoncent à faire évoluer la Commission Nationale du Débat Public pour s’orienter vers une véritable Haute autorité de la participation du public comme proposé dans notre dossier de presse du 5 mars 2015.
  • Des modalités trop contraignantes et des seuils de pétition trop élevés qui réduisent les possibilités de recours au droit d’initiative citoyenne pour déclencher un débat public.
  • Pas de possibilité de demander une expertise complémentaire via le droit d’initiative.
  • Abandon de l’idée de concertation renforcée préalable à la consultation locale.
  • Aucune mesure pour favoriser le recours aux outils innovants et méthodes participatives pour améliorer le dialogue environnemental alors qu’il s’agit d’un levier majeur.
  • Des principes qui ne vont pas assez loin et ont tendance à réduire la participation du public à l’information.

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