Décryptage

Bio sous serres chauffées, le verdict est tombé

Publié le 16 juillet 2019 , mis à jour le 20 avril 2021

Après des semaines de mobilisation de la part de la Fondation Nicolas Hulot, de la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique, de Greenpeace, du Réseau Action Climat, et le soutien de 80 000 signataires de leur pétition réclamant l’interdiction des serres chauffées en bio, la décision est tombée le 11 juillet. S’il n’y aura plus de tomates, de courgettes ou de concombres bio sur les étals avant le mois de mai, l'interdiction généralisée de tous les types de chauffage pour les serres bio pour la production hors-saison n’a pas encore été obtenue. Une victoire en demi-teinte, qui permet tout de même d’éviter le pire.

Une position de compromis pour éviter le risque d’une industrialisation de la bio

 Le chauffage des serres est une pratique utilisée principalement en agriculture conventionnelle, notamment pour produire des fruits et des légumes à contre-saison. Cette pratique n’avait jusqu’alors pas été développée en agriculture biologique et n’était par conséquent pas encadrée. Mais face à la prolifération de projets en émergence visant à produire à grande échelle des fruits et légumes d’été en hiver (comme des tomates ou des concombres), de nombreux défenseurs de la bio ont demandé un encadrement très strict de cette pratique dans le guide de lecture de l’agriculture biologique.

 Après des semaines de mobilisations des associations, dont la FNH et 12 heures d'intenses négociations au sein du comité national d’agriculture biologique (CNAB), c’est une position de compromis, proposée par le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, qui a été retenue : aucun fruits et légumes d'été bio ne seront autorisés sur les étals des magasins avant le mois de mai. Par ailleurs, si des fermes en conversion bio souhaitent malgré tout procéder à une production hors-saison, elles auront l’obligation, à partir de 2020, d’utiliser des énergies renouvelables. Dès 2025, toutes les fermes bio seront concernées.

Si l'interdiction généralisée de tous les types de chauffage pour les serres bio n’a pas été obtenue, que la bio a pu éviter le risque majeur d’industrialisation qui planait sur elle. La FNH salue cette décision qui permet de maintenir la confiance envers le logo AB.

Cette victoire en demi-teinte a été rendu possible grâce à la formidable mobilisation de dizaines de milliers de citoyens en faveur d’une cohérence pour un label bio éthique et durable : plus de 80 000 citoyens, 70 chefs cuisiniers, 100 parlementaires et 20 se sont en effet ralliés à la petition.

Rappel des risques encourus par les serres chauffées en bio

 Les problèmes que soulèvent les serres chauffées en agriculture biologique sont importants :

  • Possibilité de dénaturer l’un des objectifs de la bio qui est de respecter des cycles naturels           
  • Bilan carbone déplorable : la production sous serre chauffée émet 8 fois plus de CO2 qu’une production locale en saison et 4 fois plus qu’une production espagnole en saison importée en France. Chauffer des serres est incompatible avec l’objectif de la bio de faire « une utilisation responsable de l’énergie »
  • Résilience agronomique et économique des fermes fragilisée : chauffer une serre a un coût important. Ce coût entraîne le besoin de se spécialiser sur une production à forte valeur ajoutée ayant pour conséquence un appauvrissement des sols. Ce système affecte la résilience agronomique et donc économique de la ferme, avec un risque de développement de parasites dans le futur. Le risque encouru est la nécessité à plus ou moins long terme de demander des dérogations pour finalement avoir recours aux pesticides de synthèse.
  • Trahison de la confiance du consommateur : 58 % des Français déclarent aujourd’hui acheter de plus en plus de produits de saison. Il est donc important de répondre aux demandes des consommateurs, désireux de toujours plus de produits bio, local et de saison, avec la nécessité d’une clarté dans les labels qui leurs sont proposés.

 

 

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